L'entraînement croisé, ou cross training, une autre manière de progresser en running

L'entraînement croisé, ou cross training, une autre manière de progresser en running

Vincent Pascolo

Bien connu des traileurs, qui alternent vélo l’été, et ski de fond l’hiver, l’entraînement croisé – ou cross training – reste pourtant sous-utilisé par les coureurs sur route. La majorité des marathoniens, par exemple, ne font « que » courir. Mais entre deux sportifs déjà entraînés, existe-t-il vraiment un transfert ? Est-ce que combiner vélo, musculation et running est profitable ? Faut-il rester focalisé sur sa spécialité ou diversifier ses pratiques pour progresser ? Dans cet article, on décortique ensemble ce qu’est l’entraînement croisé en course à pied, ses avantages, ses limites, et comment l’intégrer intelligemment dans ton programme.


L’entraînement croisé : c’est quoi ?


L’entraînement croisé consiste à alterner les disciplines sportives dans une programmation. L’idée est de combiner différents types de sollicitations musculaires et énergétiques pour progresser globalement.


On distingue principalement deux formes de cross training :

- ajouter un autre sport d’endurance à son entraînement : vélo, natation… Ici, le but est d’augmenter le volume d’entraînement tout en diminuant les contraintes de la course (impacts, chocs) ; 

- ajouter de la musculation à un sport d’endurance : compléter son programme de running avec des séances de renforcement musculaire. L’objectif est de transférer la force et la puissance développées en salle vers le sport d’endurance.


Sur le papier, le transfert paraît évident entre deux sports proches (comme le vélo et la course à pied, qui sollicitent les jambes). Mais qu’en est-il de disciplines éloignées comme la natation ? De la musculation ? On va voir ça en détail.


Pourquoi intégrer du cross training dans ton plan d'entraînement ? 

 

Le vélo et la course à pied: bonne idée ou risque caché ?


Le vélo peut être un bon outil pour tous les coureurs, en particulier ceux sujets aux douleurs et tendinopathies.  En effet, il permet de travailler son endurance sans subir les chocs liés à la course. Tu peux ainsi augmenter ton volume d’entraînement tout en limitant les risques de blessure.


Les bienfaits du vélo pour la course à pied sont multiples : 

- accumuler des heures d’effort sans traumatiser ses articulations ; 

- favoriser la récupération en stimulant la circulation sanguine – idéal le lendemain d’une sortie longue ou d’une séance très intense ;

- maintenir la forme cardiovasculaire en cas de blessure ou de fatigue excessive. 


Si tu débutes, c’est une excellente solution pour progresser sans te blesser. 


Si tu es confirmé, tu peux même combiner vélo et running le même jour – par exemple une sortie vélo le matin et un footing l’après-midi – à condition de gérer tes intensités.


Étant donné les qualités de récupération du 


La musculation : un indispensable pour le coureur débutant comme confirmé


C’est probablement la forme d’entraînement croisé la plus validée scientifiquement. De nombreuses études le prouvent : la musculation améliore les performances en course à pied [1][2][3][4][5][6]. 


Ses bénéfices :

- une meilleure économie de course grâce à : une raideur tendino-musculaire renforcée (plus d’énergie restituée à chaque foulée) ; un recrutement plus efficace des fibres musculaires ; une meilleure coordination neuromusculaire.

- un retardement de la fatigue, qui te permet de repousser le mur du marathon ; 

- moins de casses musculaires, très utile notamment dans les descentes techniques en trail ; 

- une meilleure résilience du corps, car un muscle fort et des structures voisines (comme les tendons) renforcées tolèrent mieux les contraintes. En revanche, il n’existe pas encore suffisamment d’études pour affirmer que la musculation réduit réellement le risque de blessures en course à pied.


La natation : des bienfaits sur le souffle du sportif en endurance


En ce qui concerne l'entraînement croisé natation - course à pied, les études sont plus rares. Il s’agit de deux sports très différents, sollicitant des groupes musculaires distincts.


Il s’agit néanmoins d’un sport porté, qui présente quelques atouts non négligeables : 

- elle permet de « faire du volume » sans impact ; 

- elle améliore le contrôle respiratoire, ce qui peut te donner un avantage en endurance ; 

- elle favorise une meilleure coordination ; 

- elle limite la fatigue des muscles inspiratoires (comme le diaphragme et les intercostaux externes), précieux lors de longs efforts.


Même si le transfert musculaire est faible, l’entraînement croisé natation - course à pied reste pertinent pour varier les plaisirs, progresser en endurance générale et améliorer ton souffle [7][8][9][10][11].


Planning d'entraînement croisé : comment structurer ses séances

 

Plan entraînement croisé vélo - course à pied : comment l’intégrer à ton programme ?


Si tu veux combiner vélo et course à pied, deux options s’offrent à toi, selon ton profil. 


1. Tu te blesses souvent. 

Dans ce cas, tu peux remplacer une séance de course par du vélo pour continuer à progresser en endurance.


2. Tu veux progresser en course 

Si tu souhaites faire plus d’activité cardiovasculaire, tu peux ajouter à ton plan d'entraînement une sortie de vélo à faible intensité, en complément de tes séances de course.

⚠️ Attention, car les blessures sont dues à une fatigue excessive du corps. Remplacer une séance de course peut limiter le risque de blessure mais ajouter une séance de vélo à un programme de course à pied déjà dense peut le fragiliser. Dans tous les cas, avance progressivement. 


⚠️ Attention : remplacer une séance de course par du vélo ne te fera pas progresser en running. Pour progresser, il faut courir. En revanche, ajouter une sortie de cyclisme est un excellent moyen d’augmenter ton volume de zone 2 en limitant les impacts.


Programme musculation - course à pied : comment le mettre en place efficacement ?


Un bon programme de musculation dédié au running est un programme composé des bons exercices, et qui n'interfère pas avec les séances clés de la semaine. C’est-à-dire, il ne faut pas que la fatigue musculaire due à la musculation perturbent les séances d’intensité. 


Quels types d’exercices privilégier ? Et combien de séries et de répétitions ? 

Selon les études, les deux formes de renforcement musculaire qui se démarquent sont : 

- la force : charges lourdes, peu de répétitions ;

- la pliométrie : sauts.

[1][2][3][4][5][6]


Le travail de force consiste à soulever des charges lourdes avec un faible nombre de répétitions. Concrètement, tu peux viser entre 4 et 6 répétitions par série, sur 2 à 5 séries. L’objectif est de recruter un maximum de fibres musculaires et d’augmenter sa puissance sans forcément chercher à prendre du volume. Ce type de travail améliore directement ton économie de course, car tes muscles deviennent plus efficaces et plus résistants à la fatigue.


Nous te conseillons de choisir des mouvements polyarticulaires (comme les squats et variantes) dont le mouvement est proche de celui de la course à pied. Le but étant d’engager les mêmes schémas musculaires. Les meilleurs exercices sont : squat bulgare, hip thrust, extension de mollet… 


La pliométrie, de son côté, repose sur des exercices de sauts. Elle permet de renforcer la raideur tendineuse et d’optimiser le retour d’énergie à chaque foulée. Tu peux commencer avec des séries de 4 à 10 sauts, espacés de 30 s à 3 min. Pour commencer, tu peux viser un total de 30 à 60 sauts au début, puis augmenter progressivement pour atteindre 90 à 120 en fin de préparation. 


Ici, les exercices que tu peux faire sont : squats sautés, bonds sur une jambe, fentes sautées, sauts sur une box… 


⚠️ Attention : il faut y aller progressivement, le but est de se renforcer, pas de se blesser 


Combien de fois par semaine ?

La réponse dépend de ta période d’entraînement et de tes objectifs. En général, deux séances hebdomadaires sont idéales en phase de préparation, car elles permettent de construire une base solide de force et de résistance. 


Puis, à l'approche d’une compétition, il est préférable de réduire la charge musculaire pour laisser plus de place aux séances spécifiques de course. Dans ce cas, une seule séance par semaine suffit pour entretenir les bénéfices sans risquer de fatiguer inutilement tes muscles.


Musculation et course à pied le même jour ?

Il est tout à fait possible de combiner une séance de musculation et une séance de course le même jour. Cette stratégie peut même être intéressante pour créer une pré-fatigue musculaire et s’habituer à courir avec les jambes lourdes, ce qui reproduit en partie les sensations de fin de course.


Cependant, il faut rester vigilant. Si tu choisis cette organisation, opte plutôt pour une séance de musculation suivie d’un footing en endurance fondamentale. 


Évite en revanche de placer musculation et séance intense de course (comme du fractionné ou une sortie longue) le même jour, car tu risquerais de compromettre la qualité de ton entraînement. De manière générale, laisse un délai de 48 à 72 heures entre une séance de musculation exigeante et une séance de fractionné. 


En bref : l'entraînement croisé en course à pied 

L’entraînement croisé en course à pied est un formidable outil pour progresser, prévenir les blessures et éviter la monotonie. Il est particulièrement adapté si tu souffres de tendinopathies, si tu débutes ou si tu prépares un objectif exigeant (trail, UTMB, marathon). 


Mais pour en tirer tous les bénéfices, il faut apprendre à bien se connaître :

- niveau actuel ; 

- antécédents de blessures ; 

- objectifs (performance, plaisir, santé) ; 

- ressenti face à la fatigue…

Ajoute, remplace, adapte… L’essentiel est de trouver le bon équilibre pour progresser sans te blesser.



Bibliographie : 

[1] Beattie, K., Carson, B.P., Lyons, M., Rossiter, A., & Kenny, I.C. (2017). The effect of strength training on performance indicators in distance runners. Journal of Strength and Conditioning Research, 31(1), 9–23.

https://journals.lww.com/nsca-jscr/fulltext/2017/01000/the_effect_of_strength_training_on_performance.3.aspx


[2] Llanos-Lagos, C., Ramirez-Campillo, R., Moran, J., & Sáez de Villarreal, E. (2024). Effect of Strength Training Methods on Middle-Distance and Long-Distance Runners’ Athletic Performance: A Systematic Review with Meta-analysis. Sports Medicine (Auckland, N.z.).

https://doi.org/10.1007/s40279-024-02018-z


[3] Blagrove, R., Howatson, G., & Hayes, P. (2017). Effects of Strength Training on the Physiological Determinants of Middle- and Long-Distance Running Performance: A Systematic Review. Sports Medicine (Auckland, N.z.), 47(5), 921–941.

https://doi.org/10.1007/s40279-016-0607-0


[4] Beattie, K., Kenny, I.C., Lyons, M., & Carson, B.P. (2014). The Effect of Strength Training on Performance in Endurance Athletes. Sports Medicine, 44(6), 845–865.

https://doi.org/10.1007/s40279-014-0167-y


[5] Trowell, D., Fox, A., Saunders, N., Vicenzino, B., & Bonacci, J. (2021). Effect of concurrent strength and endurance training on run performance and biomechanics: A randomized controlled trial. Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports, 31(11), 2221–2232.

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/sms.14080


[6] Zanini, M., Folland, J., Wu, H., & Blagrove, R. (2025). Strength Training Improves Running Economy Durability and Fatigued High-Intensity Performance in Well-Trained Male Runners: A Randomized Control Trial. Medicine and Science in Sports and Exercise.

https://journals.lww.com/acsm-msse/Fulltext/9900/Strength_Training_Improves_Running_Economy.110.aspx


[7] Manjrekar, M., Dhane, S., & Shinde, S. B. (2023). Effect of pre-participation aquatic training program on running performance in marathon runners. International Journal of Disabilities Sports & Health Sciences, 6(3).

https://dergipark.org.tr/en/pub/ijdshs/issue/81944/1340402


[8] Martinez, V., Garza, M. S., Grazioli, G., Roca, E., Brotons, D., & Sitges, M. (2020). Cardiac adaptation to endurance exercise training: Differential impact of swimming and running. European Journal of Sport Science, 20(6), 783-792.

https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/17461391.2020.1776402


[9] Chen, Y., Lan, Y., Zhao, A., Wang, Z., & Yang, L. (2024). High-intensity interval swimming improves cardiovascular endurance, while aquatic resistance training enhances muscular strength in older adults. Scientific Reports, 14, 25241.

https://www.nature.com/articles/s41598-024-75894-0


[10] Vleck, V., Bürgi, A., & Bentley, D. (2005). The Consequences of Swim, Cycle, and Run Performance on Overall Result in Elite Olympic Distance Triathlon. International Journal of Sports Medicine, 26(1), 43-52.

https://www.thieme-connect.com/products/ejournals/html/10.1055/s-2004-817862


[11] Ferreira, F. A., Santos, C. C., Palmeira, A., Fernandes, R., & Costa, M. J. (2024). Effects of Swimming Exercise on Early Adolescents’ Physical Conditioning and Physical Health: A Systematic Review. Journal of Functional Morphology and Kinesiology, 9(3), 75.

https://www.mdpi.com/2411-5142/9/3/75

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